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Divergence USA / Europe
Outre-Atlantique, les divergences entre les Etats-Unis et l'Europe font l'objet d'un débat intellectuel

Le fossé semble inexorablement se creuser entre l'Europe et les Etats-Unis. Sur des sujets aussi fondamentaux que la Cour pénale internationale, le traité de Kyoto sur l'environnement, la dénonciation de l'Iran, l'Irak et la Corée du Nord comme "l'axe du Mal" et le conflit du Proche-Orient, même le premier ministre anglais Tony Blair et le ministre allemand des affaires étrangères Joschka Fischer, plutôt sensibles d'habitude aux arguments américains, font entendre avec agacement leur différence. Une situation inimaginable il y a cinq ans, ou même dans les semaines suivant les attentats du 11 septembre.

Les Européens sont d'autant plus amers que le seul à leurs yeux capable de les comprendre à Washington, le secrétaire d'Etat Colin Powell, ne cesse de perdre des batailles au sein du gouvernement américain face aux plus conservateurs, au point de faire naître des rumeurs sur son éventuelle démission.

S'agit-il d'un phénomène passager, lié notamment au comportement de l'administration Bush, ou d'une évolution plus durable ? Robert Kagan, chercheur et ancien haut fonctionnaire du département d'Etat, propose une explication à la fois historique et idéologique des divergences grandissantes entre l'Europe et les Etats-Unis dans un article intitulé "Power and Weakness" (Pouvoir et faiblesse) publié par Policy Review. Le Monde a donné dans ses éditions du 27 juillet et datée 28 et 29 juillet de larges extraits de ce texte qui fait débat dans les chancelleries, des deux côtés de l'Atlantique.

Pour M. Kagan, il ne s'agit pas de simples péripéties ayant pour origine "le simplisme" du gouvernement américain, pour reprendre l'expression de l'ancien ministre des affaires étrangères français, Hubert Védrine. Ces divergences, perceptibles déjà à l'époque Clinton, reflètent selon lui deux compréhensions du monde et deux stratégies pour peser sur son destin, celle du puissant et celle du faible. "Les Européens ont un grand intérêt aujourd'hui à habiter dans un monde où la force ne compte pas et où les lois et les institutions internationales prédominent. C'est ce que les faibles ont toujours voulu depuis des temps immémoriaux", écrit M. Kagan.

Les Etats-Unis et l'Europe sont à ses yeux fondamentalement différents. Leurs appréciations politiques et morales sont le fruit d'histoires dissemblables et d'une relation maintenant très différente au pouvoir. Après deux guerres mondiales, les Européens ont appris, surtout entre eux, à partager leur souveraineté "allant plus avant dans un monde autorégulé de lois et de règles transnationales, de négociations et de coopérations". Les Etats-Unis, au contraire, voient le monde comme un Etat-nation classique "où les lois et les institutions internationales ne sont pas fiables et où la sécurité et la défense de la liberté dépendent toujours de la possession et de l'utilisation de la force militaire. Les Américains n'ont pas vécu le miracle européen. Leur mémoire des cinquante dernières années est celle d'une guerre froide finalement gagnée par la force et la détermination, pas par le triomphe de la conscience morale".

Depuis la disparition de l'URSS, les différences de moyens, notamment militaires, ont pris des proportions considérables. "Les Etats-Unis devraient dépenser en 2003 dans le domaine de la défense autant que les 15 à 20 pays suivants réunis", écrivent les professeurs Stephen Brooks et William Wolhforth, du Darthmouth College, dans la revue Foreign Affairs de juillet-août 2002. "Sans surprise, cette capacité militaire sans équivalent a donné aux Etats-Unis une plus grande propension à l'utiliser, souligne M. Kagan. A l'inverse, la relative faiblesse européenne a produit une aversion pour l'utilisation de la force dans les relations internationales. C'est sur l'idée même de menace que s'opposent souvent les gouvernements de part et d'autre de l'Atlantique : Washington parle de "menace" comme la prolifération d'armements nucléaires, le terrorisme et les "Etats voyous"; les dirigeants Européens voient surtout des "problèmes" comme les conflits interethniques, les mouvements migratoires, la pauvreté et la dégradation de l'environnement."

Cette théorisation des divergences entre l'Europe et les Etats-Unis ne fait pas l'unanimité. Principale critique : même avec une domination militaire, technologique et économique sans précédent, l'Amérique ne peut se passer d'alliés et d'alliances. Paradoxalement, les attentats du 11 septembre l'ont démontré de façon éclatante. Pour combattre Al-Qaida, la supériorité militaire sur le champ de bataille est un argument nécessaire, pas suffisant.

"Aucun pays n'est capable seul, aujourd'hui, de régler le problème du terrorisme international", souligne Joseph Nye, doyen de l'école Kennedy de gouvernement de l'université Harvard. "Le pouvoir américain est moins décisif qu'il ne le semble. Sur le plan militaire, le monde est certes unipolaire. Mais, en matière économique, il est multipolaire. Les Etats-Unis ne peuvent atteindre leurs objectifs commerciaux et de stabilité financière sans la coopération de l'Europe, du Japon et d'autres. Enfin, pour résoudre les questions internationales générales qui vont du blanchiment de l'argent sale au terrorisme, cela n'a aucun sens de parler d'hégémonie", ajoute-t-il. Une opinion partagée par l'historien Stanley Hoffmann : "La diplomatie américaine a une trop grande tendance à jouer de son principal atout, la force militaire."

Eric Leser

• ARTICLE PARU DANS L'EDITION DU 30.07.02
Ecrit par Angward, à 09:28 dans la rubrique "Histoires".



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