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La Maison Blanche sera-t-elle le Kremlin du XXIe siècle ?
La lettre de soutien à George W. Bush et à l'Amérique, portant la signature des chefs d'Etat ou de gouvernement de huit pays européens, est singulièrement idéologique et peu perspicace. La liste des valeurs que les signataires prétendent partager avec les Etats-Unis n'a finalement rien d'exceptionnel : "démocratie, liberté individuelle, droits de l'homme, Etat de droit".

On notera cependant une omission de taille : le capitalisme libéral.

D'autant plus frappante qu'on ne saurait comprendre vraiment l'infâme attaque du 11 septembre 2001 sans garder à l'esprit que la cible principale en était le World Trade Center, symbole proéminent et cœur battant du capitalisme mondialisateur.

Il n'est pas moins frappant que les signataires continuent d'adhérer, à la date d'aujourd'hui, à la vision guerre froide, sanctifiée mais hautement discutable, de la place présumée indispensable occupée par les Etats-Unis dans l'histoire européenne récente : "Grâce en grande partie au courage, à la générosité et à la clairvoyance américaines, l'Europe a été libérée des deux formes de tyrannie qui ont dévasté notre continent au cours du XXe siècle : le nazisme et le communisme."

Dans les deux guerres mondiales, l'Amérique fut un allié de la dernière heure : en 1914-1918, comme en 1939-1945, le sanglant sacrifice consenti par l'Europe fut incommensurablement plus grand et plus sévère que celui de l'Amérique. Certes, les Alliés n'auraient peut-être pas emporté la victoire sans l'intervention de l'Oncle Sam, même si, tout bien considéré, le soutien fut essentiellement matériel, financier et idéologique. Incontestablement, pendant la seconde guerre mondiale, l'Armée rouge a payé un tribut infiniment plus lourd "en sang, en sueur et en larmes" que l'armée des Etats-Unis, pour renverser le cours du combat contre les puissances de l'Axe en Europe. De fait, si l'Armée rouge n'avait pas définitivement brisé les reins de la Wehrmacht en 1942-1943, il est plus que probable que les débarquements américains sur le continent, en 1944, se seraient soldés par de tragiques bains de sang.

En outre, même pendant la seconde guerre mondiale, les Etats-Unis ne subirent pas de morts dans leurs populations civiles. Cette anomalie explique en grande partie la fureur indignée qui suivit le 11 septembre 2001, date qui mit fin à l'innocence de l'exception américaine. Aujourd'hui encore, en tant qu'île-continent-nation, les Etats-Unis entendent bien limiter leurs propres pertes humaines à un minimum absolu et sont sans doute à la recherche de chair à canon (et de nerfs de la guerre et de l'occupation) tant dans la vieille que dans la vieille nouvelle Europe.

Dans la mesure où ils souscrivent implicitement à la doctrine présumée nouvelle de la guerre préventive, claironnée à tout vent par l'administration Bush, les huit signataires feraient bien de se souvenir que la logique de la guerre préventive joua un rôle central à deux instants cruciaux de la "guerre de trente ans" du XXe siècle. En juillet-août 1914, le Kaiser Guillaume II et ses conseillers précipitèrent la guerre pour anticiper le probable renversement de l'équilibre des forces militaires à l'avantage de l'Entente en 1917, lorsque la Russie tsariste aurait probablement achevé la modernisation et la préparation de ses troupes armées. Au printemps 1941, Hitler se jeta dans la guerre contre l'Union soviétique pour éviter de devoir affronter Staline au printemps 1942, alors que l'Armée rouge était supposée avoir achevé sa modernisation et sa préparation.

Qui plus est, afin de prouver que leur allégeance à l'Amérique est spontanée, les Européens schismatiques pourraient éventuellement souhaiter rappeler à leurs amis américains que la logique de la guerre préventive présida de façon significative à la préparation et à la programmation de l'attaque japonaise sur Pearl Harbour.

Ces trois guerres préventives méticuleusement planifiées eurent d'énormes conséquences inattendues et démesurées : Verdun, Auschwitz, Dresde, Hiroshima.

On ne peut que souscrire à l'affirmation que, si le Conseil de sécurité veut "maintenir sa crédibilité", il doit "s'assurer de l'application totale de ses résolutions". Mais sur ce registre aussi existe une omission, ou un silence criant : depuis 1967 au moins, le Conseil de sécurité ferme les yeux sur la violation répétée des résolutions successives des Nations unies, pour ne pas parler d'ignorance systématique de ces violations.

Serait-ce que les gouvernements de la vieille nouvelle Europe – particulièrement ceux de Pologne, Hongrie et Italie, plus la Roumanie – dans un élan de charité inspirée du Nouveau Testament, prennent aveuglément fait et cause pour Israël contre les Palestiniens, en expiation de leur rôle inique dans le judéocide ? Inutile de préciser que, pour leurs raisons politiques et géopolitiques propres, les Etats-Unis soutiennent, pour ne pas dire imposent, cette incongruité patente, voire cette duplicité.

Il n'est évidemment pas question de nier ou de minimiser le despotisme de Saddam Hussein et de son régime. Mais il est de notoriété publique que les Etats-Unis ont nourri ce genre de Frankenstein par le passé, et aujourd'hui, le monde s'accommode, dans le tiers-monde, d'un nombre non négligeable de semblables despotes.

Pourquoi l'Amérique, au moment où elle renoue avec sa mission définie par Woodrow Wilson de "rendre le monde sûr pour la démocratie", fait-elle une fixation obsessionnelle sur Saddam Hussein, décrit comme un croisement entre Staline, Hitler, Ben Laden et Satan ? Prétendre que "le régime irakien et ses armes de destruction massive représentent un danger patent pour la sécurité mondiale" relève assurément et absolument de l'hyperbole. Cette interprétation fait écho à la diabolisation d'antan à l'égard des dirigeants soviétiques successifs et de leur régime. A côté de la superpuissance de la défunte Russie soviétique qui, entre 1945 et 1989, put être endiguée sans recours à la guerre, en termes militaires et idéologiques, l'Irak fait figure de Pygmée.

Si l'économie de l'Irak reposait sur la culture des tulipes d'exportation plutôt que sur la deuxième réserve pétrolière du monde, les Etats-Unis fermeraient les yeux sur l'arsenal détenu par Bagdad, qui, au demeurant, n'excède pas sensiblement la norme habituelle.

Déjà, à la veille de 1914, le contrôle des champs pétrolifères de Mésopotamie et d'Arabie constituait un enjeu majeur dans la diplomatie des grandes puissances. Pendant et immédiatement après la première guerre mondiale, l'Angleterre et la France ne firent que se partager l'essentiel des ressources pétrolières du Proche-Orient, l'accord Sykes-Picot conclu en mai 1916 servant de schéma directeur.

Créé du jour au lendemain, l'Irak constitua le gros lot, qui échut à la Grande-Bretagne. A titre de compensation, Londres céda près d'un quart de la production pétrolière irakienne issue de la région de Mossoul à la France, qui avait reçu la Syrie, au sous-sol dépourvu de pétrole. L'hégémonie régionale de Londres était soutenue par son contrôle ininterrompu du canal de Suez et sa position de force en Palestine.

La Grande Guerre confirma qu'en temps de guerre et de paix "une goutte de pétrole vaut une goutte de sang", comme disait Clemenceau, notamment pour les pays développés. Après la seconde guerre mondiale, les Etats-Unis supplantèrent la Grande-Bretagne comme puissance dominante au Proche-Orient élargi. Lâchés par Washington, Londres et Paris ne surent pas éviter la nationalisation du canal de Suez en 1956, et cet échec symbolisa le renforcement de l'hégémonie économique et militaire américaine en Mésopotamie et en Arabie.

Les ressources de ces régions en pétrole étant aujourd'hui plus importantes que jamais auparavant, la Maison Blanche n'est pas près de tolérer le moindre défi à sa domination sur le Proche-Orient, vitale pour l'étendue du pouvoir impérial de l'Amérique, y compris celui qu'elle exerce sur les autres économies des pays développés et de la Chine.

En vérité, Washington a l'intention de donner un accès privilégié au pétrole du Proche-Orient à l'Angleterre, dont les puits en mer du Nord sont en voie d'assèchement, au détriment de la France et de l'Allemagne qui, avec le Benelux, sont – n'en déplaise à Donald Rumsfeld – le noyau dur de la nouvelle Europe, dont l'économie, avec le tout jeune euro, a toutes les chances de mettre à mal la primauté du dollar et de l'économie américaine.

Il existe un relent d'affinité idéologique entre et parmi les membres de cet "axe de la vertu" qui émerge et se propose de combattre le nouvel "axe du mal", surtout dans la mesure où Tony Blair trouve ses soutiens les plus sûrs chez les conservateurs britanniques – et australiens.

En réalité, la Maison Blanche, s'inspirant du défunt Kremlin, entend présider une Ve Internationale des gouvernements et régimes partageant les mêmes idées, et tout pays qui refusera de s'aligner sera excommunié pour entente ou commerce avec l'ennemi.

Dans cette perspective, et dans l'éventualité (assez peu probable ?) où elles tiendront bon, l'Allemagne de Schröder et la France de Chirac pourraient bien, dans leur recherche d'une troisième voie, devenir l'équivalent fonctionnel de la Yougoslavie d'antan, à l'identique. Tito redivivus ("ressuscité") !

A ce moment, l'Irak n'est pas une Ding an sich, une chose en soi : pour les Etats-Unis, l'Irak est un pion et un enjeu dans la géopolitique et la géo-économie de sa puissance impériale ; pour l'Europe authentiquement nouvelle, cette période est un test qui donnera la mesure de son autonomie politique et économique croissante, ainsi que de sa force dans le système mondial.

Il est naturel pour l'Amérique de tenter de décapiter ou de ralentir l'émancipation européenne en rassemblant, en particulier, les anciens satellites du pacte de Varsovie, dont la dette et la loyauté premières vont à l'OTAN plutôt qu'à l'Union européenne. Il n'est pas moins naturel, néanmoins, que cette Union qui vient de leur souhaiter la bienvenue exige qu'ils assument leurs responsabilités et prêtent serment. Quant à l'Angleterre, peut-être conviendrait-il de ne pas la décourager de demander à devenir le 51e Etat de l'Union américaine.

Entre-temps, tous les Européens, parce qu'ils ne connaissent que trop le coût de la guerre, devraient rappeler à Washington que les guerres transfrontalières classiques, à la façon de Clausewitz, ne sont qu'un souvenir. Comme l'apprend Israël par l'expérience, une guerre contre la terreur (ou le terrorisme) ne se gagne pas en bombardant le siège d'un gouvernement, ni en renversant un régime, ni en démantelant un arsenal.

En pensant et en se préparant à la guerre hybride et inédite de demain, les élites stratégiques de l'Union européenne devraient souligner l'importance de combiner une nouvelle génération d'armes et de tactiques militaires humaines à une nouvelle génération de stratégies politiques, sociales et culturelles, faute de quoi le fléau de la terreur sera difficile, sinon impossible à contenir.

Traduit de l'anglais (Etats-Unis)par Françoise Cartano.

Arno J. Mayer est historien, professeur émérite à l'université de Princeton.
Ecrit par Angward, à 13:54 dans la rubrique "France et consoeur".

Commentaires :

  kooltieum
15-02-03
à 17:15

Merci, j'en sais plus maintenant et je t'approuve

Peut-être même que L'Europe de Paris-Berlin devrait aussi en profiter pour donner l'Euro à la Russie pour les aider a se reconstruire, et pourquoi pas, dévaluer ce même Euro en

même temps pour créer (dans tous les sens du terme),ce qui manque à l'Europe, un commerce réellement équitable (références au pertes engengrées par le reniement de l'administration Bush), une véritable zone d'échange culturelle (l'Europe),des gens heureux, bref, tout ce qui pourrait en découler de bon serait long à lister je pense !

Je sais, c'est utopique, mais les théories et les applications nazis de hitler et Bush, même opposé (le boucher et le shérif finances), accomplissent des actions plus concrète que ça !




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