Une goutte de trop
L’angoisse était bien le mot, cela résumait bien la situation. Il manquait une seule chose a cette personne pour accomplir son dessein et bien entamer son projet. Mais sans elle rien n’était possible, rien ne pouvait progresser, évoluer, son projet serait mort et définitivement impossible.
La veille, elle avait réussi un exploit mais malgré ses capacités hors du commun, son projet avait avorte prématurément sans cette chose. Elle en révisa toute la conception, toutes les dimensions, toutes les lois, vérifia leur bon fonctionnement, leur logique… si l’une ne contredisait pas l’autre, si chacune avait un rôle, si toutes étaient raisonnables. Tout était parfait. Rien ne clochait, rien ne devait clocher. Pourtant sa réalisation était bloquée mais sa passion immense, sans bornes, la fit persister. Apres mure réflexion, sur ses origines, sur son but et sur son histoire, elle constata qu’elle n’avait pas été la seule a être handicapée par des règles trop rigides. Son ancêtre avait lui aussi rencontre le même problème, mais son orgueil n’admettait pas, ne pouvait admettre, qu’elle seule, était incapable de réussir. Elle refusa toute aide, s’enfonçant dans une réflexion qui semblerait impossible pour le commun des mortels. Pourquoi, une telle obstination ? Elle avait un honneur, des qualités que tous le monde avait reconnu, que tout le monde honorait et rien n’aurait pu faire plus mal que d’avouer son incapacité a égaler son maître. De plus, il était fort probable que ce dernier n’aurait pas voulu lui révéler son secret car de cette création apparaît tout, tout ce dont on a besoin, tout ce dont on rêve, tout ce qui vit.
Longtemps, elle observa son œuvre inaboutie, désespérée, sa création à peine commencée qui déjà lui montrait ses limites. Des idées étaient apparues mais elle devait tricher et quoi de plus infâme : tricher était un péché, même pour elle, on ne triche pas sur la nature même des choses.
Elle se changea les idées et continua son œuvre, les jours suivant. La théorie était là, elle avait même aboutie son projet, elle avait tous les paramètres, toutes les dimensions, tous les destins mais rien pour résoudre son énigme. Elle n’était pas infaillible, elle devait se le tenir pour vérité. Elle était au-dessus des autres mais pas au-delà. Elle, omniprésente, elle, génie parmi les génies, ne savait que faire, ses yeux se mirent à pleurer. Ses larmes glissèrent le long de ses joues jusqu’à tomber sur son œuvre qui l’accepta comme vérité, bouclant ainsi le cercle de la création. Elle ne vit pas ce qu’elle venait de provoquer, son œuvre venait d’être corrompue. Cette larme avait brisé toutes lois, avait pénétré dans un monde hors de la réalité et avait donné vie a une création absurde, sans sens, sans but.
Elle avait résolu son énigme par une faute, une larme, une goutte qui remplit les mers et fit exploser sa confiance en ses capacités. Ainsi fut créé le monde, la tristesse et la mer.